Amiens 1988 – quatre immigrés « élus associés » à la mairie
Un reportage de Mogniss H. Abdallah & Joy Banerjee 6 min. 9 » – mars 1988 / Production Agence IM’média
à voir ici :
https://www.youtube.com/watch?v=TCf9dKcpBPY
Amiens, la ville natale d’Emmanuel Macron, est un laboratoire pour le droit de vote et d’éligibilité des résidents étrangers. Entre 1987 et 1989, quatre immigrés y ont siégé au conseil municipal à titre d’élus associés. Depuis, des initiatives locales et nationales se multiplient pour l’obtention de ce droit à part entière, autour notamment de l’Association de soutien à l’expression des communautés d’Amiens (Aseca) et de la Lettre de la citoyenneté. Un combat de longue haleine, comme le souligne le titre du livre de Bernard Delemotte, « Le droit de vote des étrangers, une histoire de quarante ans » (L’Harmattan, 2017). Quand bien même le président de la République ne s’y déclare pas « favorable », à rebrousse-poils d’une opinion publique qui selon le dernier sondage Harris Interactive est pour à 62%, Amiens se mobilise à nouveau lors des municipales de mars 2020, avec l’organisation par le collectif J’y suis, J’y Vote, de votes symboliques (c/o MAAM 12, rue Frédéric Petit 80000 Amiens).
Amiens, 19 décembre 1987. Un millier d’immigrés élisent quatre
« représentants associés » de nationalité étrangère auprès du conseil
municipal, où ils siègent à titre consultatif. Ils participent aux
délibérations sur la vie locale, mais sont situés légèrement à l’écart
et ne participent pas aux votes. A chacune de leurs interventions, le
maire René Lamps (PCF) doit formellement interrompre la séance pour
rester dans la légalité, et elles ne doivent pas figurer au procès
verbal. En clair, ils n’ont pas de pouvoir de décision. C’est pourquoi
ils disent participer à cette expérience de manière transitoire, dans la
perspective d’un réel droit de vote et d’éligibilité pour les résidents
étrangers.
Entretemps, le « représentant associé » Ahmed Lamamra, membre de
l’Amicale des Algériens en Europe et président de l’association des
commerçants sur le marché où il tient un stand de fringues, jouit d’un
nouveau statut de notable agissant auprès de l’ensemble des Amiénois, et
non plus seulement auprès de la communauté algérienne. Tout comme
Armando Lopes, membre de l’association portugaise de la Somme et
dirigeant d’un club de football local, qui donne aussi son avis sur le
budget municipal, les équipements collectifs ou sur la desserte TGV. Au
grand dam de l’opposition de droite et d’une partie des « Français
musulmans » ou Harkis qui contestent ces ingérences « politiques » dans des sujets
relevant de la « souveraineté nationale », ou qui protestent contre le
« privilège » de « représentants associés » non élus par le suffrages
universel des citoyens français, mais par les seuls résidents immigrés. Pour leur part, Ahmed Nouri (Marocain) et Souleye Bethily (Sénégalais)
n’ont pas les mêmes relais associatifs ou politiques, et ne tirent pas
de prestige personnel particulier du fait de leur nouvelle situation
d’élus « associés ». Et ils ne sont pas dupes du caractère consultatif de
cette expérimentation. D’où leur exigence plus grande encore de voir
advenir le droit de vote pour tou-tes.
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